Droit de la preuve et des obligations - partie 2
Droit de la preuve et des obligations - partie 2 - M2 notariat
Droit de la preuve et des obligations - partie 2 - M2 notariat
Kartei Details
| Karten | 80 |
|---|---|
| Sprache | Français |
| Kategorie | Recht |
| Stufe | Universität |
| Erstellt / Aktualisiert | 13.12.2025 / 13.12.2025 |
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Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - la notion de terme :
Comme l’évènement conditionnel, le terme est un évènement de réalisation future à la survenance duquel les obligations contractuelles vont être liées. Toutefois, à la différence de la condition, le terme est un évènement de réalisation certaine.
Pendant un temps, la Cour de cassation avait admis que les parties puissent qualifier un évènement de terme, alors que sa survenance était objectivement incertaine. Seul comptait le fait que les parties aient été certaines que l’évènement allait se réaliser.
Autrement dit, la certitude du terme pouvait être subjective.
Cette jurisprudence offrait certes une certaine souplesse aux contractants, mais elle avait le tort de brouiller la frontière entre le terme et la condition.
De surcroît, la situation était ubuesque lorsque l’évènement, dont la réalisation avait été considérée comme certaine par les parties, ne se produisait pas.
Elle a donc été abandonnée dans un arrêt 13 avril 1999, confirmé le 13 juillet 2004.
Depuis, ne peut être érigé en terme qu’un évènement objectivement inéluctable. Le terme est alors dit certain, lorsque l’on connaît le jour de sa réalisation, c’est le cas de l’arrivée d’une date.
Il est dit incertain, lorsque l’on est sûr qu’il se produira, mais que l’on ne sait pas quand, comme la mort (art. 1305 in fine).
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme :
Il faut distinguer les effets du terme suspensif (A), de ceux du terme extinctif (B). Attention, si le terme suspensif est réglementé par le Code civil, ce n’est pas le cas du terme extinctif, auquel il est simplement fait allusion dans les dispositions relatives à la durée du contrat (art. 1210 suivants).
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme suspensif - effets avant l'échéance du terme - le principe : l'exigibilité différée de l'obligation :
Les effets de la convention affectée d’un terme sont repoussés à plus tard. Plus précisément, ils sont différés au jour de la réalisation de l’évènement. La convention est donc valablement formée, mais temporairement inefficace.
Quid alors de la différence avec la condition suspensive ? Puisqu’il n’y a pas d’incertitude sur la production ultérieure des effets de la convention, on considère que l’obligation qui est affectée d’un terme suspensif existe déjà, à la différence de l’obligation affectée d’une condition suspensive.
Si l’existence de l’obligation à terme n’est pas remise en cause, c’est son exigibilité qui est repoussée à plus tard. L’exigibilité est la qualité d’une obligation lui permettant d’être réclamée par le créancier.
Le créancier ne peut donc pas réclamer l’exécution avant l’échéance, mais si le débiteur paye avant l’échéance, il ne peut obtenir remboursement (art. 1305-2). « Qui à terme doit ».
NB : au contraire, si le débiteur d’une obligation sous condition suspensive paye pendente conditione, il peut obtenir le remboursement, car il a payé une obligation inexistante (art. 1304-5
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme suspensif - effets avant l'échéance du terme - les exceptions : l'exigibilité immédiate de l'obligation :
Il est des hypothèses dans lesquelles, bien que le terme ne soit pas échu, l’obligation va être considérée comme immédiatement exigible.
Si l’on met de côté l’hypothèse de la renonciation au terme par son bénéficiaire, qui est en principe le débiteur (1305-3 du Code civil), cette exigibilité immédiate va être prononcée à titre de sanction du débiteur.
Il s’agit donc de cas de déchéance du terme. Le Code civil prévoit à l’article 1305-4 deux cas importants de déchéance du terme : l’obligation devient immédiatement exigible si le débiteur « ne fournit pas les sûretés promises au créancier ou s'il diminue celles qui garantissent l'obligation ».
Le créancier a en effet tendance à accepter de différer l’exigibilité de l’obligation lorsque le débiteur lui a conféré des garanties de paiement. Si le débiteur ne fournit pas ces garanties ou s’il les diminue, le risque est grand que le créancier ne puisse plus obtenir le paiement à l’échéance.
C’est pourquoi la déchéance du terme peut être prononcée afin de permettre au créancier d’agir immédiatement en exécution, et de sauver ce qui peut encore l’être.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme suspensif - effets avant l'échéance du terme - les exceptions : effet après l'échéance du terme.
Lorsque le terme est échu, l’obligation devient immédiatement exigible. Le débiteur doit donc exécuter, et le créancier peut exercer une action en exécution forcée, après cependant avoir mis le débiteur en demeure.
NB : la mise en demeure est une interpellation solennelle par laquelle le créancier exige du débiteur en retard qu’il exécute son obligation.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif :
Le terme extinctif a pour effet d’entraîner, lors de son arrivée, l’extinction des obligations qui en sont affectées et, par extension, l’extinction du contrat, si toutes les obligations qu’il a engendrées sont affectées par le terme.
Le contrat est alors à durée déterminée, et il s’oppose au contrat à durée indéterminée qui n’a pas de limite temporelle autre que l’interdiction de la perpétuité.
On verra la situation des contractants jusqu’à l’échéance du terme (1), puis la situation des parties à l’échéance du terme (2).
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractantts jusqu'à l'échéance du terme - principe l'exécution fidèle du contrat :
Tant que le terme extinctif n’est pas échu, le contrat doit être exécuté fidèlement par les parties.
L’existence d’un terme qui mettra fin aux obligations contractuelles et, partant, au contrat lui- même n’affecte pas son exécution.
C’est aujourd’hui ce qu’énonce clairement l’article 1212 : « Lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme. »
Dans l’intervalle, les normes comportementales qui régissent le contrat s’appliquent normalement et, en particulier, le contrat est irrévocable.
Le tempérament à cette exécution fidèle réside dans la possible faculté de résiliation unilatérale du contrat.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractantts jusqu'à l'échéance du terme - tempérament : la résiliation unilatérale du contrat :
On a vu que si, dans les contrats à durée indéterminée, chaque partie a le droit de résilier unilatéralement le contrat, sauf à respecter un préavis (art. 1211), ce n’est pas le cas dans les contrats à durée déterminée, c'est-à-dire les contrats affectés d’un terme extinctif.
Toutefois, même dans un contrat à durée déterminée, le législateur ou les contractants peuvent offrir à chaque partie, ou à l’une d’elles la faculté de résilier unilatéralement le contrat.
Quid de la situation des contractants à l’échéance du terme ?
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - le principe :
À l’échéance du terme extinctif, le contrat prend fin et les parties sont libérées de leurs engagements. Le contrat prend fin sans rétroactivité, il est résilié et non résolu.
La résiliation opère en effet pour l’avenir sans remettre en cause les effets produits sous l’empire du contrat éteint.
Il est toutefois possible que le contrat survive à l’arrivée du terme extinctif.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - les excéptions :
La prorogation / le renouvèlement / la tacite reconduction
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - les excéptions - la prorogation
Les parties peuvent prévoir, dans leur contrat à durée déterminée, une clause de prorogation du contrat. Le bénéfice de cette clause peut être étendu à toutes les parties au contrat ou être réservé à une partie, sous réserve qu’elle ne soit pas considérée comme abusive.
La clause offre une option aux contractants qui vont, en la levant, prolonger le contrat de la durée prévue par la clause elle-même, et selon les conditions prévues par la clause.
C’est la liberté contractuelle qui prime et se sont donc les parties qui fixent les modalités de fonctionnement de la clause.
En principe, c’est le même contrat qui continuera à produire son effet au-delà du terme extinctif initialement prévu.
Les contrats de sportifs professionnels prévoient parfois ce type de clause : tel joueur peut par exemple signer un contrat de 4 ans avec un club avec une année de plus en option, au choix du joueur.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - les excéptions - le renouvellement du contrat :
Il est des contrats qui sont vitaux pour l’activité économique des contractants. C’est le cas par exemple du bail commercial.
NB : le bail commercial est le contrat par lequel un commerçant va louer à un propriétaire un local dans lequel il va exercer son activité.
L’emplacement du commerce, notamment pour les commerçants de détail, conditionne le plus souvent la prospérité du fonds de commerce. Au début du XXe siècle, les commerçants se sont plaints de ce que les propriétaires avaient la faculté de les mettre dehors une fois l’échéance du bail commercial arrivé.
Ils ont ainsi réclamé une protection particulière au législateur qui leur a accordé un droit au renouvellement du bail arrivé à expiration.
Des règles protectrices ont donc été mises en place ; elles figurent aujourd’hui dans le Code de commerce
Certes, le propriétaire a toujours la faculté de refuser le renouvellement. S’il ne disposait pas de cette faculté, on pourrait considérer qu’il est injustement privé de la jouissance de son bien.
Toutefois, s’il refuse le renouvellement, il devra payer au commerçant une indemnité d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement.
Cette indemnité est souvent très importante, car elle comprend la valeur marchande du fonds, augmentée des frais de déménagement et de réinstallation. Elle est donc dissuasive, ce qui explique que l’on parle de véritable « droit au renouvellement » du bail.
Le renouvellement fait naître un nouveau contrat, à la différence de la prorogation, nouveau contrat qui sera toutefois identique au premier.
Si la loi ou le contrat ne précise pas la durée pour laquelle le contrat est renouvelé, celui-ci est alors à durée indéterminée (art. 1214).
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - les excéptions - la tacite reconduction - droit commun :
L’article 1215 du Code civil prévoit un cas particulier de renouvellement. Lorsqu'à l'expiration du terme d'un contrat conclu à durée déterminée, les contractants continuent d'en exécuter les obligations, il y a tacite reconduction.
Un nouveau contrat, identique au premier, liera les contractants, sauf si une des parties s’est manifestée pour qu’il y soit mis fin. Le principe et l’exception sont ainsi renversés, et c’est le silence qui permet le renouvellement.
Le simple fait de continuer l’exécution est donc suffisant pour le renouvellement.
Si une clause du contrat ou si la loi ne prévoit pas la durée du renouvellement, le contrat renouvelé est alors conclu pour une durée indéterminée.
Dans les contrats passés entre consommateurs et professionnels, le plus souvent, une clause reconduisait tacitement le contrat pour une durée déterminée, ce qui a poussé le législateur à réagir.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - les obligations à terme (article 1305 à 1305-5) - le régime du terme - les effets du terme exctinctif - la situation des contractants à l'échéance du terme - les excéptions - la tacite reconduction - droit de la consomation :
Les consommateurs sont souvent engagés dans les liens de multiples contrats dont les conditions leur ont été imposées. Il n’est pas rare qu’ils ignorent la teneur de leur engagement et la date anniversaire des contrats.
La clause de tacite reconduction était donc devenue une clause de style permettant au professionnel de se constituer une clientèle « captive » (abus des opérateurs mobiles).
Si le consommateur laissait passer la date anniversaire du contrat et continuait à payer son forfait mobile par exemple, le contrat était tacitement reconduit pour une durée déterminée, ce qui empêchait le consommateur de le résilier avant la fin de la nouvelle période !
C’est pourquoi le législateur a ajouté un nouvel article L. 215-1 dans le Code de la consommation afin de forcer le professionnel à rappeler au consommateur, en temps utile, qu’il peut s’opposer à la tacite reconduction prévue au contrat.
Si le professionnel ne délivre pas cette information, le consommateur peut résilier le contrat reconduit pour une durée déterminée, et ce, à tout moment.
Les modalités des obligations (Condition et terme) - conclusion :
Conclusion : Nous en avons terminé avec les effets du contrat vis-à-vis des parties. Le contrat engendre principalement deux séries d’effet.
D’abord, il crée des normes de comportement qui s’imposent aux parties. Le contrat a en effet force obligatoire ce qui oblige les parties à respecter la teneur de leur accord, la modification unilatérale du contrat étant proscrite, et à respecter la durée de leur accord, la révocation unilatérale du contrat étant interdite, sous les réserves et exceptions que nous avons vues, notamment dans les contrats à durée indéterminée.
Les parties doivent également se comporter de bonne foi, la bonne foi étant considérée en droit français comme un complément de la force obligatoire.
Ensuite, le contrat peut engendrer des obligations qui sont, en principe, pures et simples, mais qui peuvent être conditionnelles ou à terme.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - intro
L’article 1163 du Code civil interdit la fixation unilatérale de la prestation.
L’interdiction de la fixation unilatérale de la prestation par une partie a posé problème s’agissant de cette prestation particulière qu’est le prix. En matière de vente, l’article 1591 du Code civil impose, spécialement, que le prix soit déterminé et désigné par les parties au moment de la formation du contrat.
Assouplissant sa position, la Cour de cassation a accepté que le prix d’une vente puisse être désigné ultérieurement, mais uniquement si la détermination du prix ne dépend pas d’un accord de volontés des parties ou, a fortiori, de la volonté d’un seul.
Par exemple, le prix peut être déterminé ultérieurement par un tiers ou par une méthode de calcul mathématique reposant sur des éléments objectifs.
Or, la jurisprudence antérieure à la réforme avait appliqué rigoureusement cette solution, au- delà du domaine de la vente, notamment dans les contrats-cadre.
On verra quelle a été l’évolution de la jurisprudence antérieure (§1), avant de s’intéresser aux articles 1164 et 1165 issus de la réforme du droit des obligations (§2).
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - l'évolution de la jp antérieure à la réforme :
Type de contrat problématiques :
Les contrats qui posaient problème prenaient la forme de contrats-cadre, c’est-à-dire de contrats qui fixent le cadre des relations des parties, et qui sont complétés ultérieurement par des contrats d’application.
La jurisprudence s’était développée dans le domaine des pompistes de marque.
Le pompiste, entrepreneur indépendant, passait un accord avec une société pétrolière. Le contrat cadre définissait les relations des parties : la société pétrolière s’engageait à fournir le matériel, les cuves, l’enseigne… tandis que le pompiste s’engageait, pour sa part, à s’approvisionner exclusivement chez le pétrolier en question.
Le problème est qu’il était, et qu’il est toujours, impossible de fixer le prix de l’essence une fois pour toute lors de la conclusion du contrat-cadre. Ce prix ne pouvait être fixé que lors des livraisons successives, en raison de la volatilité des cours du pétrole, du prix de l’acheminent du brut et de son raffinage.
Il était alors prévu, dans ces contrats-cadre, que le prix de l’essence serait fixé par référence au « prix catalogue » de la Société pétrolière, manière pudique de dire que le prix serait fixé unilatéralement par la Société pétrolière, celle-ci appliquant sa marge sur les coûts.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - l'évolution de la jp antérieure à la réforme :
Type de contrat problématiques - positions de la CC
Autrement dit, le créancier du prix fixait unilatéralement le prix. Pendant 25 ans (de 70 à 95), la Cour de cassation a donc annulé ces contrats pour indétermination du prix, dès lors que le pompiste le réclamait.
D’abord, l’annulation a été prononcée sur le fondement de l’article 1591 relatif à la vente. Ce fondement était critiqué, car les contrats en question n’étaient pas des ventes au sens strict.
Puis, l’annulation a été prononcée sur le fondement plus général de l’ancien article 1129, alinéa 2 du Code civil.
La jurisprudence estimait alors que la détermination du prix ne devait pas dépendre de la volonté des parties, et a fortiori, de l’une d’entre elles, quel que soit le type de contrat.
Il y avait donc une grande insécurité juridique, tous ces contrats étant potentiellement annulables.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - l'évolution de la jp antérieure à la réforme :
Type de contrat problématiques - positions de la CC
Pourquoi les actions en annulation :
NB : Pourquoi les actions en annulation ?
Parce que les contrats-cadre prévoyaient que si le pompiste souhaitait changer de réseau, il devait, notamment, restituer les cuves. Or, les travaux et l’acheminement de ces cuves coûtaient très cher. En outre, en cas de non-restitution des cuves, des clauses pénales sanctionnaient le pompiste. Or, avant la loi du 9 juillet 1975, le juge n’avait pas le pouvoir de modérer le montant de la clause.
Ces clauses avaient donc pour but d’empêcher le pompiste de résilier pour faire jouer la concurrence.
Toujours est-il que la protection des pompistes n’a eu de cesse d’augmenter : interdiction des clauses de restitution des cuves par l’ancêtre de l’autorité des marchés financiers ; modération de la clause pénale par le juge etc.
Ces évolutions ont permis le revirement de la Cour de cassation, l’annulation du contrat n’étant plus utile à la protection du pompiste.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - l'évolution de la jp antérieure à la réforme :
Type de contrat problématiques - revirement de JP de la CC :
La Cour de cassation a donc effectué un revirement de jurisprudence, qui a inauguré la position nouvelle de la jurisprudence s’agissant de la détermination du prix dans les contrats-cadre.
Par plusieurs arrêts d’assemblée plénière du 1er décembre 1995, la Cour de cassation avait décidé que l’ancien article 1129 du Code civil n’était plus applicable aux contrats-cadre, et aux contrats de distribution.
Dans ces contrats, la détermination du prix n’était plus considérée comme une condition de validité. C’est dire que la fixation unilatérale du prix, ou la référence à un prix catalogue n’était plus susceptible d’entraîner la nullité du contrat.
Un temps limité au contrat-cadre, la solution avait été étendue, notamment par un arrêt du 12 mai 2004, à toutes les conventions ayant pour objet un prix, dès lors au moins qu’un textespécial n’érige pas la détermination du prix en condition de validité.
NB : C’est le cas de l’article 1591 du Code civil. C’est dire qu’en matière de vente simple, le prix doit toujours être déterminé, ou au moins déterminable ultérieurement par le biais de mécanismes n’impliquant plus la volonté des parties.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - l'évolution de la jp antérieure à la réforme :
Type de contrat problématiques - pour résumer (ant réforme 2016) :
Pour résumer, sous l’empire de l’ancienne version du Code civil, l’exigence de détermination de la prestation n’était plus applicable au prix, dès lors qu’il n’existait aucun texte spécial.
Est-ce à dire que, par ces arrêts de 1995, la Cour de cassation avait abandonné le cocontractant à l’arbitraire du détenteur du pouvoir unilatéral ?
Non, car en vérité la Cour de cassation avait fait glisser son contrôle de la formation vers l’exécution du contrat. Si la fixation unilatérale était interdite à l’origine, c’était parce que le contractant en situation de force risquait d’abuser de son pouvoir.
Ainsi, plutôt que d’interdire la fixation unilatérale du prix, la Haute juridiction avait décidé, dans ses arrêts de 1995, de la contrôler. Ainsi, la Cour de cassation avait prévu que l’abus dans la fixation du prix entraînerait soit la résiliation, soit une indemnisation de la victime.
C’est dire que la Cour de cassation veillait à ce que le déséquilibre des pouvoirs n’entraîne pas un déséquilibre abusif du contrat.
NB : on voit que le juge ne s’était pas arrogé le pouvoir de modifier le prix. La Cour de cassation ne disait pas que le juge pouvait baisser le prix fixé à un niveau trop élevé. Il y aurait eu une atteinte trop frontale à notre conception du contrat qui postule que la convention est la chose des parties et que le juge ne peut la refaire.
La Cour de cassation s’était donc contentée d’autoriser le juge à indemniser le cocontractant lésé en condamnant le maître du prix à lui verser une somme. d'argent.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - la solution des articles 1164 à 1165 - le domaine de la fixation unilatérale du prix :
Maintient ou modification du droit antérieur ?
À l’inverse du droit positif antérieur, la réforme du droit des contrats n’a pas autorisé, en principe, la fixation unilatérale du prix. La réforme a donc modifié le droit positif.
En effet, l’article 1164 du Code civil n’autorise la fixation unilatérale du prix que dans les contrats cadre, sans plus mentionner les contrats à exécution successive. Encore faut-il d’ailleurs que la fixation unilatérale ait été convenue, c’est-à-dire prévue dans le contrat par une stiupulation.
En outre, l’article 1165 du Code civil permet, dans les contrats de prestation de service, la fixation unilatérale du prix, mais uniquement par son créancier. En revanche, dans ce type de contrat, la fixation unilatérale du prix est toujours possible, même si elle n’a pas été prévue.
Il s’agit de la consécration de la jurisprudence antérieure qui admettait que la détermination du prix n’était pas une condition de validité dans les contrats d’entreprise1, le coût d’une prestation de faire étant parfois difficilement évaluable avant qu’elle soit accomplie.
La volonté du législateur de circonscrire le périmètre de la fixation unilatérale du prix dans un domaine précis est donc patente.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - la solution des articles 1164 à 1165 - le domaine de la fixation unilatérale du prix :
Défauts du système :
Il n’en reste pas moins que le défaut majeur de ce système est de faire de la qualification du contrat un enjeu fondamental, la possibilité d’une fixation unilatérale dépendant du type de contrat dans laquelle elle est prévue.
Or, si le législateur a fait l’effort de définir ce qu’est un contrat cadre, il n’a pas pris la même précaution s’agissant des « contrats de prestation de service ». À l’évidence, c’est le contrat d’entreprise qui a été visé par le législateur (prestation contre prix), celui-ci ayant sans doute souhaité consacrer la jurisprudence antérieure sur ce point.
Mais quid des contrats mixtes qui prévoient à la fois un transfert de propriété et une prestation de service, comme l’entretien du matériel acheté ?
À cette difficulté, la jurisprudence en a ajouté une seconde. Pour que les articles en question puissent s’appliquer, encore faut-il que, pour le type de contrat conclu, il n’existe pas une règle spéciale qui exclut la fixation unilatérale du prix. Or, la Cour de cassation a fait une application très compréhensive de la règle specialia generalibus derogant dans un arrêt de la chambre commerciale du 20 septembre 2023 (n° 21-25.386). Elle a considéré qu’un article issu
- d’un décret (alors que les articles 1164 et 1165 ont été introduits par une ordonnance valant loi) ;
- antérieur à l’ordonnance de 2016 ;
- qui se contente d’énoncer de manière générique que les contrats de l’expert-comptable doivent être « écrits » et définir « leur mission » en « précisant les droits et obligations de chacune des parties »
suffisait à déroger à l’article 1165 et à interdire la fixation unilatérale du prix !
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - la solution des articles 1164 à 1165 - le rôle du juge :
Le législateur a renoncé à étendre le rôle du juge dans les contrats cadre en lui donnant le pouvoir de réviser le prix fixé abusivement dans les contrats d’application.
La Cour de cassation, qui s’était refusée à donner un blanc-seing au « maître du prix » dans ses arrêts de 1995, avait en effet permis aux juges du fond de sanctionner le prix abusif. Ces derniers pouvaient, face à un prix abusif, résilier le contrat ou indemniser le débiteur ; ils ne pouvaient donc pas réviser directement le prix.
L’article 1164, alinéa 2 du Code civil consacre donc le droit antérieur puisque la partie lésée ne peut demander que l’octroi de dommages et intérêts ou, « le cas échéant », la résolution du contrat.
Dans les « contrats de prestation de service », seul le créancier a le pouvoir de fixer unilatéralement le prix de la prestation. En outre, à la différence des contrats cadre, ce mode de fixation du prix n’a pas à être « convenu ». Il est prévu automatiquement, dès lors que les parties ne se seront pas accordées sur le prix, avant l’exécution de la prestation.
À l’occasion de la loi de ratification du 20 avril 2018, le parlement a légèrement modifié l’article 1165 en permettant au juge de résoudre le contrat, et non pas seulement d’indemniser la victime. La version originelle de l’article 1165 ne permettait pas, en effet, une telle résolution, ce qui était regrettable.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - la solution des articles 1164 à 1165 - le rôle du juge :
NB : Quid de la faculté des juges de modifier les honoraires ?
Avant la réforme, la Cour de cassation avait octroyé aux juges la possibilité de modifier le montant des honoraires fixés unilatéralement ou forfaitairement par le créancier dans certains contrats, tels le mandat2 et, plus largement, des professionnels libéraux3, payés par des honoraires.
Cette jurisprudence pourrait être brisée4 par la réforme.
En effet, en cas de fixation unilatérale après la formation du contrat, l’article 1165 du Code civil ne permet au juge que d’indemniser la victime et non pas de modifier le prix.
Par ailleurs, si l’honoraire est fixé forfaitairement lors de la conclusion du contrat, l’article 1168 du Code civil qui précise que l’équilibre des prestations n’est pas une condition de validité, semble interdire toute intervention judiciaire.
Il faudra toutefois attendre une décision de la Cour de cassation pour connaître le devenir de la jurisprudence relative à l’honoraire (sauf lorsqu’il existe un texte spécial, comme pour les contrats qui relèvent de l’article L. 442-1 C. com. Ce texte permet en effet un contrôle du prix abusif par le biais de la notion de clause abusive). Attention, en droit commun (art. 1171) et en droit de la consommation (art. L. 212-1 C. cons.), le contrôle du prix n’est pas possible sur le fondement de la notion de clause abusive.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - la solution des articles 1164 à 1165 - le rôle du juge :
Conclusion :
Conclusion : la conception traditionnelle du rôle du juge en droit contractuel français est finalement confortée par les articles 1164 et 1165 du Code civil. Classiquement, on considère en effet que le juge n’a pas le pouvoir de corriger le contenu de la loi des parties.
En d’autres termes, il ne peut pénétrer dans la sphère contractuelle pour en modifier la teneur.
De deux choses l’une alors, soit le contrat ne respecte pas les conditions de validité imposées par la loi, et il est nul en tout ou partie, soit il est valable et il s’impose aux contractants, comme au juge.
Les articles 1164 et 1165 du Code civil traduisent donc la méfiance traditionnelle de notre ordre juridique à l’endroit du juge judiciaire. Le juge ne peut pas corriger le prix abusif. Même abusif, ce prix devra être payé, car telle est la loi des parties.
En revanche, sans toucher au contenu du contrat lui-même, le juge pourra en corriger les effets néfastes du contrat en octroyant à la partie lésée, à qui un prix abusif a été réclamé, des dommages et intérêts. L’intégrité du contenu du contrat est donc sauve de l’intervention du juge, les sommes dues par chacune des parties devant se compenser.
D’un point de vue symbolique, le parti pris du législateur est donc fort.
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - le contrôle de l'équilibre économique du contrat :
La question de l’équilibre économique recouvre celle de la lésion. La lésion est le préjudice résultant, pour l’une des parties à un contrat, d’un défaut d’équivalence entre l’avantage qu’elle obtient et le sacrifice qu’elle consent.
En principe, la lésion n’est pas sanctionnée. Tant pis si le vendeur a vendu trop peu cher ou si l’acheteur a acheté trop cher.
Toutefois, le Code civil interdit que, dans les contrats conclus à titre onéreux, la contrepartie convenue soit dérisoire ou illusoire, ou qu’une clause vide de sa substance une obligation essentielle.
Si l’on voulait résumer en une phrase, on dirait que les prestations réciproques n’ont pas à être économiquement proportionnelles, pourvu qu’elles ne soient pas inexistantes.
On verra donc d’abord, l’absence de prise en compte de principe de la lésion (§1), avant de voir l’interdiction des contreparties illusoires et dérisoires de l’article 1169 (§2)
S4 Le contenu du contrat (I) : le prix et l'équilibre économique - les dispositions relatives au prix - le contrôle de l'équilibre économique du contrat - l'absence de prise en compte de principe de la lésion :
En droit français, l’impératif de sécurité juridique a primé sur la justice contractuelle.
Aucun texte de portée générale n’exige ainsi l’équilibre économique du contrat. Mieux, l’article 1168 du Code civil énonce que « le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause de nullité du contrat, à moins que la loi n’en dispose autrement ».
On se rappellera aussi que :
- L’obligation d’information de l’article 1112-1 ne porte pas sur la valeur de la prestation ;
- L’erreur sur la valeur est en principe indifférente : art. 1136 du Code civil.
- La dissimulation intentionnelle ne peut être reprochée à un contractant lorsqu’elle concerne la valeur : 1137, al. 3 (issu de la loi de ratification du 20 avril 2018).
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La lésion n’a donc qu’une influence exceptionnelle en droit positif :
- Les mineurs non émancipés ne peuvent pas, en principe, contracter seuls. Ils n’ont pas la capacité requise. Toutefois, ils peuvent accomplir seuls les actes de la vie courante.
Ces actes ne sont alors pas nuls pour incapacité, mais ils ne sont nuls que s’ils sont lésionnaires.
Autrement dit, le mineur non émancipé qui a accompli un acte de la vie courante peut le faire annuler s’il est déséquilibré à son détriment.
L’article 1149 du Code civil parle de « simple lésion ». Le déséquilibre le plus faible peut ainsi être pris en compte, le déséquilibre en question étant apprécié par le juge.
- De surcroît, les majeurs placés sous sauvegarde de justice peuvent invoquer la simple lésion à propos de tous les contrats qu’ils ont passés (435). Il en va de même des majeurs sous curatelle ou tutelle pour les actes qu’ils étaient en droit de passer sans assistance.
Dans le Code civil, la lésion est prise en compte dans deux hypothèses : la vente d’immeuble (article 1674) et le partage (889).
- S’agissant de la vente d’immeuble, la lésion n’est prise en compte que lorsqu’elle frappe le vendeur, et non l’acheteur. On peut en effet être contraint de vendre, mais rarement d’acheter.
De plus, elle doit être de plus de 7/12 ème. Cela signifie que, pour pouvoir invoquer la lésion, il faut que le vendeur ait reçu moins de 5/12 ème du prix réel.
- S’agissant du partage, le copartageant qui reçoit moins des ¾ de la part à laquelle il avait droit peut invoquer la lésion.
C’est dire que la lésion doit être au moins du quart dans le partage pour être prise en compte.
Tous les cas de lésions prises en compte ne figurent pas dans le Code civil. D’autres ont été ajoutés postérieurement par le législateur ou le juge.
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Conclusion :
Conclusion : le Code civil ne sanctionne donc pas, en principe, la lésion. Il ne le fait que par exception. La réforme n’a pas changé cet état de fait. On a vu, cependant, que l’abus de dépendance est sanctionné par l’article 1143 s’il a abouti à l’obtention d’un avantage manifestement excessif (séance 3).
Certains auteurs appellent parfois ce mécanisme, non pas « vice d’abus de faiblesse », mais « lésion qualifiée ».
Cet article met en effet en place un mécanisme hybride :
– Moitié vice du consentement puisqu’il faut une contrainte qui pèse sur le consentement de la victime ;
– Moitié lésion puisqu’il faut un abus ayant entraîné un avantage manifestement excessif, c’est-à-dire un déséquilibre.
Pourquoi lésion qualifiée ? Parce qu’il faut une lésion, mais une lésion qui procède d’un vice du consentement. Le simple déséquilibre objectif ne suffit pas, il faut qu’il se double d’un vice du consentement.
Il y là, en quelque sorte, une percée du contrôle de l’équilibre économique en droit positif. C’est la raison pour laquelle les auteurs les plus libéraux n’y sont pas favorables.
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