Droit de la preuve et des obligations

Droit de la preuve et des obligations - M2 notariat.

Droit de la preuve et des obligations - M2 notariat.


Kartei Details

Karten 109
Sprache Français
Kategorie Recht
Stufe Universität
Erstellt / Aktualisiert 01.11.2025 / 02.11.2025
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Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - l'écrit - l'acte sous signature privée - l'acte sous signature privée contresigné par avocat - première propriété : 

Première propriété : D’abord, l’article 1374, alinéa 1, du Code civil énonce que « l’acte sous signature privée contresigné par avocat fait foi de l’écriture et de la signature des parties ».

Autrement dit, l’acte d’avocat fait foi de son origine, sans avoir besoin d’être « reconnu » par la partie à laquelle on l’oppose. L’avocat, pourtant totalement indépendant des pouvoirs publics, à la différence d’un officier public, s’est ainsi vu doter du statut de « tiers de confiance ».

Certes, ce statut ne vaut que pour l’origine de l’acte, mais il atteste de la mutation de la mission de l’avocat, ou plutôt de son extension. La partie qui conteste être l’auteur de l’acte contresigné ne pourra donc plus se contenter de désavouer son écriture pour ôter toute force probante à celui-ci dans l’attente de la vérification d’écriture.

Elle devra victorieusement user de la procédure de faux des actes sous signature privée, régie par le Code de procédure civile. Le risque de la preuve du faux pèsera, cette fois, sur celui qui prétend que l’acte contresigné est faux.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - l'écrit - l'acte sous signature privée - l'acte sous signature privée contresigné par avocat - première propriété - sur la distinction entre procédure de vérification d'écriture et procédure de faux : 

En effet, bien que calquée l’une sur l’autre, la procédure de vérification d’écriture et la procédure de faux divergent dans leurs objectifs.

La première a pour but de vérifier que l’écriture ou la signature émane bien de celui à qui on impute l’acte. S’il y a un doute, la vérification aura échoué et l’acte n’aura donc pas force probante.

La seconde a, au contraire, pour but de démontrer que le document est faux. En cas de doute, l’acte sera donc considéré comme non falsifié ; le risque de la preuve reposera ainsi sur celui qui prétendait que sa signature ou son écriture avait été imitée.

Le renforcement de la force probante de l’acte contresigné par avocat réside précisément dans l’impossibilité pour les parties de simplement dénier leur signature et, corrélativement, dans l’obligation qui leur est faite de démontrer que l’acte est faux.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - l'écrit - l'acte sous signature privée - l'acte sous signature privée contresigné par avocat - seconde propriété : 

Seconde propriété. Ensuite, et au même titre que l’acte notarié, l’acte contresigné par avocat est dispensé de « toute mention manuscrite exigée par la loi ». Cette propriété concerne, non pas les effets de l’acte, mais les conditions de sa formation.

Elle n’est toutefois pas anodine en ce qu’elle présuppose que le consentement des parties est aussi bien éclairé par l’avocat que par le notaire. De là à en déduire que les contrats solennels peuvent être passés par acte notarié ou par acte d’avocat, il y a un pas que le législateur n’a pas souhaité franchir pour l’instant, mais qu’il franchira peut-être demain.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - l'écrit - l'acte sous signature privée - l'acte sous signature privée contresigné par avocat - question : 

Question. Le législateur a, malheureusement, manqué l’occasion de procéder à une clarification salutaire. La loi du 28 mars 2011 a intégré, dans la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, un article 66-3-1 qui énonce qu’« en contresignant un acte sous seing privé, l’avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte ».

Cette propriété est mystérieuse. Certains auteurs en déduisent qu’en contresignant l’acte, l’avocat se préconstitue la preuve de la bonne exécution de son obligation de conseil.

De la sorte, le contreseing aurait pour effet de renverser la charge de la preuve, et d’obliger les parties à démontrer qu’elles n’ont pas reçu les informations adéquates. Cette interprétation est plus que douteuse.

Pourquoi l’avocat serait-il le seul professionnel, tenu d’une obligation de conseil, à ne pas avoir à prouver la bonne exécution de celle-ci ? Les travaux parlementaires révèlent d’ailleurs que cela n’a jamais été l’intention du législateur.

L’article 66-3-1 de la loi du 31 décembre 1971 n’a donc pas d’autre intérêt que de rappeler à l’avocat qu’il se doit de conseiller les contractants avant d’apposer sa signature, encore que la portée du conseil ait été indûment réduite aux seules « conséquences juridiques » de l’acte.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - l'écrit - l'aveu judiciaire : 

L’aveu consiste, de la part de celui contre lequel on allègue un fait, à en reconnaître l’exactitude.

Et, comme son nom l’indique, l’aveu judiciaire est celui qui est fait en justice, soit dans des conclusions écrites, soit à l’oral, pendant l’audience.

Cet aveu doit, en principe, être fait consciemment et volontairement. Toutefois, la jurisprudence a tendance aujourd’hui à considérer qu’un aveu peut être fait de manière implicite, c’est-à-dire sans que celui qu’il l’a fait ait eu conscience qu’il reconnaissait, par sa déclaration, le droit de l’autre partie.

En somme, on peut débusquer, dans les propos d’un plaideur, un aveu qu’il n’avait pas conscience de faire.

En vertu de l’article 1356, « l’aveu fait pleine foi contre celui qui l’a fait ».
En d’autres termes, le juge, quelle que soit son intime conviction, doit tenir pour exacts les faits qui ont été avoués.

S’il en est ainsi, c’est que les conditions dans lesquelles l’aveu a été fait, c’est-à-dire en justice, garantissent le sérieux de l’aveu et son caractère réfléchi.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve parfaits - le serment décisoire : 

Le serment décisoire est l’ultime recours de celui à qui incombe la charge de la preuve, et qui n’a pas pu rapporter cette preuve par un autre mode admissible.

On le dit décisoire parce qu’il va décider de l’issue de la contestation. Son mécanisme s’opère en deux temps :

*Celui sur qui pèse la charge de la preuve défère le serment au défendeur sous le contrôle du juge.

*Le défendeur a alors une alternative à trois branches :

  • Soit il prête serment et il gagne le procès

  • Soit il refuse et il perd le procès

- Soit il réfère le serment au demandeur qui s’il prête serment gagne et s’il refuse perd...

La force probante du serment décisoire est absolue : la prestation de serment ou le refus de prêter serment détermine le gain ou la perte du procès, quelle que soit l’intime conviction du juge.

Le juge ne dispose d’aucune marge de manœuvre s’agissant des preuves parfaites. En revanche, il retrouve sa liberté s’agissant des preuves imparfaites.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve imparfaits - 

Au sein des preuves imparfaites, on trouve par ordre décroissant d’importance, le témoignage (A), les indices (anciennement présomptions du fait de l’homme) (B), l’aveu extrajudiciaire (C), le serment supplétoire (D).

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve imparfaits - le témoignage : 

Le témoignage peut se définir comme « l’affirmation par une personne de l’existence d’un fait dont elle a eu personnellement connaissance ».

Ce mode de preuve a longtemps été considéré avec faveur, surtout dans les sociétés où l’instruction, et donc l’écrit, était peu répandue. C’est pourquoi un adage de l’Ancienne France, « témoins passent lettres », signifiait qu’on accordait plus de force probatoire aux témoignages qu’aux écrits.

Il fallut attendre la découverte de l’imprimerie et, plus généralement, le développement de l’écrit pour qu’on se rende compte de la sécurité que pouvait apporter l’écrit par rapport au témoignage.

L’ordonnance de Moulin de 1566 vint ainsi restreindre considérablement le domaine du témoignage, en renversant la règle : « Lettres passent témoins ».

Aujourd’hui, les faiblesses du témoignage, qui tiennent à la nature humaine (mauvaise foi, oubli), en font un mode de preuve imparfait.

En d’autres termes, il ne lie pas le juge qui est libre d’en apprécier souverainement la force.

Le juge tiendra notamment compte des liens du témoin avec la partie en faveur de laquelle il témoigne, de la précision du témoignage et de la concordance des témoignages.

Cela ne signifie pas qu’un témoignage isolé ne puisse pas emporter la conviction du juge.

Cependant, « abondance de biens ne nuit pas »..., de sorte que plus nombreux et concordants sont les témoignages, plus la probabilité de voir le juge convaincu augmentera.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve imparfaits - les indices (anciennement présomptions du fait de l'homme ) : 

Les indices constituent un mode de raisonnement employé par un plaideur pour tenter d’emporter la conviction du juge.

Lorsqu’il est trop difficile, voire impossible, de prouver directement un fait, un plaideur va prouver un autre fait dont il va déduire l’existence du fait inconnu qu’il cherche à démontrer.

Par exemple : voici un plaideur qui cherche à démontrer qu’au moment de l’accident de la circulation dont il a été victime, il ne roulait pas à plus de 50 kilomètres/heure. Sauf à avoir une machine à remonter dans le temps, il ne peut prouver directement sa vitesse.

Ainsi, il se fondera sur l’existence des traces de freinage, pour prouver que, compte tenu de la longueur de celles-ci, il ne pouvait pas rouler en excès de vitesse au moment de l’accident.

D’un fait connu (la longueur des traces), il déduira l’existence d’un fait inconnu (la vitesse au moment de l’accident).

Comme pour tous les modes de preuve imparfaits, le juge est libre d’apprécier la pertinence de la présomption.

En somme, au juge de décider si l’existence de la fumée fait présumer l’existence du feu...

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve imparfaits - l'aveu extrajudiciaire : 

L’aveu extrajudiciaire est un aveu qui est fait en dehors du procès ou hors la présence du juge, par exemple lors d’une opération d’expertise.

Puisqu’il n’a pas été constaté par le juge, l’aveu devra être prouvé par celui qui l’invoque, soit par écrit, s’il a été consigné dans un écrit, soit par témoin, s’il n’a été qu’oral.

Encore faut-il alors que la preuve par témoin soit recevable, ce qui n’est pas le cas pour les actes juridiques de plus de 1500 euros.

Quant à la force probante de l’aveu extrajudiciaire, la loi ne le précise pas.

Mais compte tenu des conditions dans lesquelles il a été fait, et de la manière dont il doit être rapporté, la Cour de cassation a considéré que les juges du fond n’étaient pas liés par l’aveu extrajudiciaire et, en conséquence, qu’ils étaient souverains pour apprécier sa valeur et sa portée.

Droit de la preuve civile - les modes de preuve - les modes de preuve imparfaits - le surment supplétoire : 

Le serment supplétoire ne peut être employé que pour compléter une preuve. Il est à la disposition du juge qui peut le déférer d’office lorsque les preuves ne lui paraissant pas suffisantes, il souhaite en compenser les faiblesses.

En pratique, le juge ne recourt quasiment jamais au serment supplétoire. Il préférera de loin ordonner une mesure d’expertise. Le serment supplétoire était en effet le dernier recours du juge lorsqu’il était véritablement neutre et qu’il ne pouvait en aucun cas participer à la recherche de la preuve, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

Très rarement utilisé, le serment supplétoire diffère du serment décisoire sur deux points :

  • -  Il ne peut être déféré que par le juge, non par une partie.

  • -  S’agissant d’un mode de preuve imparfait, il ne lie pas le juge qui est libre d’en tirer les conditions qu’il lui plaira.

Les avants contrats - 3 principaux : 

Il existe trois principaux avant-contrats, le pacte de préférence (Section 1), la promesse unilatérale de contrat (Section 2) et la promesse synallagmatique de contrat (Section 3).

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - définition : 

Le pacte de préférence est aujourd’hui défini à l’article 1123 du Code civil : « le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter ».

Le pacte de préférence est donc un véritable contrat. En principe, il s’agit d’un contrat unilatéral, car seul celui qui promet de donner la priorité au bénéficiaire a souscrit un engagement.

Toutefois, il est possible que cet engagement ait une contrepartie pécuniaire, le bénéficiaire rémunérant la priorité qui lui a été offerte. Le contrat prend alors un aspect synallagmatique : une priorité contre une rémunération.

Aucune des parties au pacte de préférence ne s’est engagée à conclure le contrat, pas plus le « promettant », dont la promesse ne porte que sur la priorité donnée au bénéficiaire au cas où il se décide à contracter, que le bénéficiaire qui peut décliner l’offre qui lui sera faite.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - définition - type de contrat qu'il peut concerner / cdtion de validité : 

Le pacte de préférence peut concerner tous les types contrats. Le plus souvent cependant, le pacte de préférence vise une vente. Ainsi, une personne propriétaire d’un bien, qui ne souhaite pas le vendre pour l’instant, et qui ne souhaitera d’ailleurs peut-être jamais le vendre, s’engage à proposer la vente de ce bien en priorité au bénéficiaire du pacte.

S’agissant des conditions de validité du pacte de préférence, elles sont très souples. Même s’il s’agit d’un pacte de préférence portant sur une vente :

- Les parties n’ont pas à fixer le prix au moment du pacte. Le rédacteur d’acte doit être prudent et prévoir la forme que le « prix » prendra. Par exemple, une contrepartie pécuniaire. Sinon, le risque est que le promettant choisisse une contrepartie que le bénéficiaire ne sera pas en mesure de fournir : tel bien, que le bénéficiaire ne possède pas, mais qui est entre les mains, opportunément, du tiers avec qui le promettant veut conclure.

- De même, la priorité n’a pas à être bornée dans le temps. En tout cas, c’est ce qui semble résulter de l’article 1123. Toutefois, si la priorité n’est pas bornée dans le temps, le risque est que le pacte soit considéré comme étant à durée indéterminée. Dès lors, le promettant pourra la résilier unilatéralement, sauf à respecter un délai de préavis (C. civ., art. 1211). C’est ce qui résulte d’un arrêt du 25 septembre 2024, rendu par la première chambre civile (n° 23-14.777). Évidemment, et opportunément, le promettant ne manifestera son intention d’aliéner qu’après l’expiration dudit délai... Le pacte ne serait donc pas efficace...

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - définition - question pratique :

Question pratique : le promettant viole-t-il le pacte de préférence lorsqu’il s’engage, avant l’expiration du pacte de préférence, dans les liens d’une PUV, mais que l’option n’est levée qu’après cette expiration ?

Dans un arrêt de la troisième chambre civile du 6 déc. 2018 (n° 17- 23321), la Cour de cassation a décidé que le fait, pour le promettant, de s’engager à vendre son bien, par une promesse unilatérale de vente, avant l’expiration du pacte de préférence était une violation de ce dernier, peu important que l’option ait été levée par le bénéficiaire après cette expiration. Autrement dit, la seule conclusion de la PUV suffit à la violation du pacte de préférence, le promettant devant proposer la vente, en priorité, au bénéficiaire.

NB : Le rédacteur d’acte doit être précis lors de la rédaction du pacte ! Si la priorité ne porte que sur la « vente » d’un bien, le promettant peut encore le donner, l’échanger, l’apporter à une société, etc.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet : 

Il faut distinguer les effets du pacte à l’égard du bénéficiaire (1), du promettant (2), et des tiers (3).

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard du bénéficiaire : 

Le bénéficiaire ne souscrit en principe aucun engagement, sauf l’éventuelle rémunération de la priorité qui lui a été octroyée.

Quoi qu’il en soit, il ne s’engage pas à contracter. Il peut en effet librement refuser l’offre qui lui sera faite, et ce, même si elle est conforme aux conditions qui avaient pu être établies d’un commun accord lors de la rédaction du pacte de préférence.

Le pacte de préférence est donc, en principe, un contrat unilatéral qui n’oblige que le promettant.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard du promettant : 

*Si le promettant ne s’oblige pas non plus à passer le contrat visé par le pacte de préférence, il s’oblige à proposer le contrat en question au bénéficiaire du pacte s’il se décide à passer le contrat. En somme, le promettant n’aliène pas sa liberté de contracter ou non, il aliène sa liberté de contracter avec telle personne de son choix.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard du promettant - 2 cas de figure : 

Deux cas de figure peuvent se présenter :

  • -  Il est possible qu’un tiers se manifeste et fasse une offre au promettant. Si cette offre satisfait le promettant, il doit alors se tourner vers le bénéficiaire pour lui proposer le contrat aux conditions offertes par le tiers. Si le bénéficiaire accepte, le contrat est formé entre le promettant et le bénéficiaire. Si le bénéficiaire refuse, le promettant est libre de contracter avec le tiers.

  • -  Il est également possible que le promettant se décide spontanément à contracter. Il doit alors proposer le contrat aux conditions qu’il détermine, ou aux conditions prévues par le pacte au bénéficiaire. Si le bénéficiaire accepte, le contrat est conclu. S’il refuse, le promettant peut se tourner vers les tiers, et leur proposer le contrat aux conditions offertes au bénéficiaire.

    Mais, s’il ne trouve aucun candidat et qu’il décide de modifier les conditions de l’offre, en baissant le prix de vente par exemple, il doit retourner voir le bénéficiaire pour savoir s’il accepte de conclure le contrat avec ces nouvelles conditions, et ainsi de suite...

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard du promettant :

  1. *Que se passe-t-il si le promettant ne propose pas le contrat au bénéficiaire et contracte directement avec un tiers au mépris du pacte de préférence ? Les solutions figurent aujourd’hui dans l’article 1123, alinéa 2 du Code civil.

D'abord ;

  1. D’abord, et cela n’a jamais posé de difficulté, le bénéficiaire peut obtenir réparation du préjudice qu’il a subi.

    Il peut se retourner contre le promettant, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, puisque ce dernier aura méconnu son contrat.

    Il peut se retourner contre le tiers bénéficiaire, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle. Mais à quelle condition ?

    S’il connaissait l’existence du pacte ?

    S’il connaissait l’existence du pacte et l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, comme pour la sanction de la substitution que l’on va voir ?

La jurisprudence la plus récente indique que le tiers, qui connaît l’existence d’un pacte de préférence, n’a pas à s’enquérir de l’intention du bénéficiaire. Dans ces conditions, on voit mal comment on pourrait lui reprocher d’avoir commis une faute délictuelle en contractant. Il semble donc se confirmer que l’action interrogatoire, mise en place par l’article 1123, al. 3 et 4 est une pure faculté :

Civ. 3e, 4 mars 2021, 19-22.971 : « D’une part, ayant énoncé à bon droit qu’il incombe au bénéficiaire d’un droit de préférence et de préemption qui sollicite l’annulation de la vente et sa substitution dans les droits du tiers acquéreur de rapporter la double preuve de la connaissance, par celui-ci, de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir, la cour d’appel a exactement retenu qu’il ne pouvait être reproché aux crédits- bailleurs, professionnels du financement immobilier, de s’être abstenus de procéder à des vérifications autres que celles opérées au fichier immobilier.

En définitive, le tiers ne peut donc devoir des dommages et intérêts que s’il avait connaissance du pacte ET de l’intention du bénéficiaire.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard du promettant :

  1. *Que se passe-t-il si le promettant ne propose pas le contrat au bénéficiaire et contracte directement avec un tiers au mépris du pacte de préférence ? Les solutions figurent aujourd’hui dans l’article 1123, alinéa 2 du Code civil.

Ensuite ;

Ensuite, le bénéficiaire peut obtenir l’annulation du contrat passé entre le promettant et le tiers, ou sa substitution dans les liens du contrat conclu en méconnaissance du pacte. Pour ce faire, le bénéficiaire devra prouver que le tiers connaissait et l’existence du pacte et la volonté du bénéficiaire de s’en prévaloir !

Le législateur a consacré la solution d’un arrêt relativement récent rendu par une chambre mixte le 26 mai 2006.

Toutefois, s’il est normal que l’on exige que le tiers ait eu connaissance du pacte de préférence, il est absurde que l’on érige en condition de la substitution le fait qu’il ait eu connaissance de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir.

En effet, au moment de la conclusion du contrat entre le promettant et le tiers, le bénéficiaire peut ne pas être au courant des modalités de l’offre. Dans ces conditions, comment le bénéficiaire pourrait avoir connaissance de l’intention du bénéficiaire de se prévaloir du pacte, alors que lui-même n’est pas en mesure de se déterminer ?

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - à l'égard des tiers : 

Le tiers est, comme son nom l’indique, étranger au pacte de préférence. S’il n’a pas connaissance de ce pacte de préférence, et la preuve de cette connaissance est à la charge du bénéficiaire, son comportement est irréprochable, et le contrat qu’il a passé est inattaquable.

La sécurité des transactions impose en effet que le contrat qu’il a passé soit maintenu. C’est le promettant qui est alors seul fautif, et il devra réparer seul sur le fondement de la responsabilité contractuelle, par des D-I, le préjudice qu’il a causé au bénéficiaire du pacte.

En revanche, le contrat peut être annulé, comme on vient de le voir, si le tiers avait connaissance de l’existence du pacte et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir.

Pour les D-I, voir supra.

Les avants contrats - le pacte de préférence (1123 C.civ) - effet - action interrogatoire : 

L’article 1123 comprend une innovation majeure. Les alinéas 3 et 4 de cet article octroient au tiers qui soupçonne l’existence d’un pacte de préférence au profit d’une autre personne, une action interrogatoire.

Le tiers pourra interroger, par écrit, celui qu’il pense être bénéficiaire d’un pacte pour lui demander s’il est bel et bien titulaire d’un pacte de préférence et s’il compte s’en prévaloir.

L’effet de cette action est énergique.

Si la personne interrogée ne répond pas dans le délai raisonnable que le tiers lui aura laissé, elle perdra la possibilité de demander la nullité ou la substitution.

En revanche, elle devrait toujours pouvoir se retourner contre le promettant pour lui réclamer des dommages et intérêts.

Il s’agit donc d’un moyen pour le tiers de purger l’incertitude de sa situation.

Est-il certain que cette action soit utile au tiers ? On peut en douter. Si le tiers ignore l’existence du pacte, il n’a pas intérêt à purger cette incertitude. En effet, s’il ne connaît pas l’existence du pacte, le bénéficiaire ne pourra pas demander la nullité ou la substitution, ni des dommages et intérêts au tiers (cf. la jurisprudence précitée). Autrement dit, le tiers est protégé par son ignorance !

NB : cette action est d’application immédiate ; elle pourra être exercée même si le pacte a été conclu avant le 1er octobre 2016.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - définition :

Dans une première approximation, on peut définir la PUC comme une convention par laquelle une partie promet de contracter avec une autre personne, appelée bénéficiaire, à des conditions déterminées, si celui-ci le désire.

Cet avant-contrat est aujourd’hui régi par l’article 1124 du Code civil.

La PUC est d’abord un contrat formé par l’échange des consentements du promettant et du bénéficiaire. La PUC se distingue donc de l’offre qui est un acte unilatéral.

La PUC est ensuite un contrat unilatéral, puisqu’elle n’engage en principe que le promettant.

NB: paradoxalement, la promesse unilatérale peut prendre la forme d’un contrat synallagmatique lorsque le bénéficiaire s’engage à payer une indemnité d’immobilisation dans l’hypothèse où il ne lèverait pas l’option : exclusivité sur la vente contre rémunération.

Attention, comme on le verra après, cela ne signifie pas que la promesse unilatérale de vente se transforme en promesse synallagmatique de vente !

Le bénéficiaire dispose quant à lui d’une option, accepter ou non le contrat qui a fait l’objet de la convention de promesse. Cette option prend la forme de ce qu’on appelle un droit potestatif, potestas signifiant pouvoir. La PUC confère donc à son bénéficiaire le pouvoir de former le contrat définitif.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - effets - à l'égard du promettant : 

Le promettant s’est engagé, par la PUC, à contracter. Le contrat qui a fait l’objet de la promesse est à moitié formé. Aux termes de l’article 1124 du Code civil, il ne manque que le « consentement du bénéficiaire ». Le promettant a en effet donné, par la PUC, son consentement au contrat projeté. Autrement dit, la PUC est censée figer le consentement du promettant.

Il promet d’ores et déjà le contrat futur, et il ne reste plus au bénéficiaire qu’à donner son consentement au contrat futur.

Par exemple, le propriétaire va promettre de vendre son appartement au bénéficiaire, à des conditions que les parties à la promesse ont négociées. Le bénéficiaire, qui a accepté lapromesse, n’a alors plus qu’à lever l’option qui lui a été conférée pour conclure le contrat de vente.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - effets - à l'égard du bénéficiaire - droit d'option : 

Par la PUC, le bénéficiaire se voit octroyer une option : conclure le contrat promis, ou non. S’il se décide à conclure le contrat, on dit qu’il lève l’option. Il joint alors son consentement au consentement du promettant qui était figé dans la promesse.

En d’autres termes, la levée d’option permet la formation définitive du contrat promis.

Pour cela, et parce que le promettant ne souhaite pas être trop longtemps dans l’attente, l’option est le plus souvent conférée pour une durée déterminée. Passé ce délai, l’option est caduque, et le promettant retrouve sa liberté.

Si l’option est le plus souvent enfermée dans un délai, elle a également parfois une contrepartie qu’on appelle indemnité d’immobilisation.

NB : si l’option n’est pas enfermée dans un délai, la promesse est en principe à durée indéterminée. Pour résilier cette promesse, le promettant doit mettre le bénéficiaire en demeure de lever l’option dans un délai raisonnable. Toutefois, dans un arrêt du 27 janv. 2021, n° 18- 22.492, la Chambre commerciale a décidé que, des termes de la promesse, pouvaient découler un délai raisonnable, qui, en l’espèce, était expiré plus de 11 ans après la signature de celle-ci. Notamment, ne figurait pas, dans la promesse, de mécanisme d’indexation du prix de vente. Attention, toute promesse de vente immobilière de plus de 18 moins doit être passée par acte authentique à peine de nullité : L. 290-1 CCH.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - effets - à l'égard du bénéficiaire - indemnité d'immobilisation :

Pendant toute la durée de l’option, le promettant est lié par la force obligatoire du contrat de promesse. Il ne peut donc pas se lier avec une autre personne que le bénéficiaire, s’agissant du contrat promis.

Lorsque la promesse unilatérale porte sur une vente, cela signifie que le promettant ne pourra pas vendre son bien à un tiers.

Le bien est donc immobilisé pendant toute la durée de l’option. Cette immobilisation à un coût. C’est pourquoi, elle est rémunérée le plus souvent par le bénéficiaire qui a obtenu l’exclusivité de la conclusion de la vente pendant une certaine durée. De deux choses l’une alors :

  • -  Si l’option est levée, l’indemnité d’immobilisation qui a été versée par le bénéficiaire viendra en déduction du prix de la chose. Elle prendra ainsi la nature d’un acompte.

  • -  Si l’option n’est pas levée, l’indemnité d’immobilisation sera conservée par le promettant en guise de rémunération de l’option qui avait été conférée au bénéficiaire. En pratique, les actes précisent que l’IM est due entier, même si le bénéficiaire renonce à la promesse avant la fin de l’option.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - effets - à l'égard du bénéficiaire :

  1. NB: La « promesse unilatérale de vente » ne se transforme pas en une « promesse synallagmatique de vente » lorsqu’une indemnité d’immobilisation est prévue. La promesse synallagmatique de vente est une promesse dans laquelle le promettant s’engage à vendre et le « bénéficiaire » à acheter (v. infra.).

  1. En effet, même s’il rémunère l’option, le bénéficiaire ne s’engage jamais à acheter. Il reste libre d’acheter ou non, en abandonnant l’indemnité d’immobilisation. La promesse est donc toujours unilatérale, même si le bénéficiaire s’engage à payer un prix.

    À cela, il y avait une exception, lorsque l’indemnité d’immobilisation était très élevée. La jurisprudence avait décidé que lorsque cette indemnité était trop importante, le bénéficiaire qui était certes libre, en droit, d’acheter ou non, ne l’était plus, d’un point de vue économique, compte tenu de la somme qu’il allait perdre (Civ. 3e, 16 nov. 1994, n° 92-16.099.).

    La Cour de cassation avait, semble-t-il, mis fin à cette jurisprudence dans un arrêt du 1er décembre 2010, n° de pourvoi : 09-65673. Elle avait décidé que le montant de l’indemnité importait peu (en l’espèce, elle était presque égale au prix de vente) : la promesse restait unilatérale, car, juridiquement, le bénéficiaire n’a pas donné son consentement à la vente et reste libre de lever, ou non, l’option.

    Malheureusement, dans un arrêt inédit ultérieur, la Cour de cassation a, à nouveau, laissé entendre que l’importance de l’indemnité pouvait supprimer la liberté du bénéficiaire de ne pas acheter et entraîner, en conséquence, la requalification en promesse synallagmatique de vente (Civ. 3e, 26 sept 2012, n° 10-23.912).

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation del a PUV : 

Les alinéas 2 et 3 de l’article 1124 du Code civil traitent de la violation de la promesse unilatérale de contrat. L’alinéa 2 a vocation à briser la célèbre jurisprudence Cruz rendue par la 3e ch. Civile le 15 déc. 1993. Il consacre donc l’inefficacité de la rétractation (a). L’alinéa 3 traite, quant à lui, du sort du contrat passé par le promettant avec un tiers, en méconnaissance de la promesse unilatérale (b).

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation de la PUV - l'inefficacité de la révocation - cruz : 

Dans son arrêt du 15 décembre 1993, la troisième chambre civile de la Cour de cassation avait estimé qu’un promettant qui se rétractait pendant le délai d’option laissé au bénéficiaire ne s’exposait qu’à des dommages et intérêts.
Autrement dit, la Cour de cassation se refusait à priver la rétractation de toute efficacité en constatant la formation du contrat promis.

Selon la Cour de cassation, le promettant devait maintenir son consentement en vertu d’une obligation de faire. La Cour de cassation en déduisait que, puisque l’inexécution des obligations de faire devait se résoudre en dommages et intérêts, en vertu de l’ancien article 1142 du Code civil, le promettant ne devait au bénéficiaire, à titre de sanction de sa rétractation, qu’une somme d’argent.

Cette justification était doublement contestable.

D’abord, parce que, à supposer que le promettant ait bel et bien souscrit une telle obligation de faire, rien n’interdisait de le condamner à l’exécution forcée. Il y avait beau temps en effet que le principe et l’exception contenus dans l’ancien article 1142 avaient été inversés. Le débiteur d’une obligation de faire pouvait donc parfaitement être condamné à l’exécution forcée, sauf si celle-ci pesait trop sur sa liberté.

Ensuite, c’est l’analyse de la situation en termes d’obligation qui était erronée. Si le promettant doit maintenir son consentement, ce n’est pas parce qu’il a souscrit une obligation de faire, ou de ne pas faire d’ailleurs, mais en raison de la force obligatoire du contrat de promesse.
La rétractation du promettant avant la levée d’option devrait donc être considérée comme inexistante, le promettant ne pouvant revenir sur un consentement irrévocable, parce que figé dans le contrat de promesse.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation de la PUV - l'inefficacité de la révocation - intervention législateur : 

La jurisprudence Cruz est brisée par l’article 1124, alinéa 2 du Code civil qui en prend l’exact contrepied : « la révocation de la promesse pendant le temps laissé au bénéficiaire pour opter n’empêche pas la formation du contrat promis ».

Cette sanction découle de l’analyse unitaire du consentement du promettant qui figure dans la définition de la promesse unilatérale. Le contrat de promesse unilatérale est distinct du contrat promis. Toutefois, en donnant son consentement au contrat de promesse unilatérale, le promettant donne également son consentement au contrat promis, puisque seul manque à ce dernier « le consentement du bénéficiaire ».

La force obligatoire du contrat de promesse lui interdit ainsi de se rétracter : pacta sunt servanda.

Il n’en reste pas moins que, si le promettant se rétracte, c’est, le plus souvent, parce qu’il a reçu une meilleure offre d’un tiers. L’alinéa 3 de l’article 1124 prévoit alors les conditions de l’annulation.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation de la PUV - l'inefficacité de la révocation - intervention législateur - application dans le temps de la CC : 

Dans un arrêt du Civ. 3e, 6 déc. 2018, n° 17-21170 17-21171 (« Qu’en statuant ainsi, alors que, la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse unilatérale postérieurement à la rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut être ordonnée, la cour d’appel a violé les textes susvisés »), la troisième chambre civile, contre toute attente, avait décidé de maintenir la jurisprudence Cruz pour les PUV conclues avant le 1er octobre 2016 ! La rétractation du promettant était donc efficace !

Finalement, dans la même affaire, la troisième chambre civile a décidé de s’incliner et de consacrer l’inefficacité de la rétractation. Pour cela, elle n’a pas abandonné l’analyse obligationnelle de la PUV. Elle considère toujours que le promettant souscrit une « obligation de faire ». Toutefois, elle a consenti à reconnaître que l’ancien article 1142 du Code civil permettait l’exécution forcée des obligations de faire en général et donc de l’obligation de maintenir son consentement en particulier !

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation de la PUV - l'inefficacité de la révocation - intervention législateur - argumentaire de certains auteurs : 

NB 2 : Notez que certains auteurs estimaient que priver la rétractation de son efficacité était contraire à la constitution au motif que le législateur portait atteinte à la liberté contractuelle, voire au droit de propriété. L’argument était faible. En contractant, le promettant a, lui-même, restreint sa liberté contractuelle et a envisagé de perdre la propriété, le législateur ne faisant que tirer les conséquences de son engagement dans l’article 1224, alinéa 2.

Dans un arrêt du 17 octobre 2019, la Cour de cassation a, sans surprise, estimé qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer l’article 1124 devant le Conseil constitutionnel, l’argument en question n’étant pas sérieux.

Les avants contrats - la promesse unilatérale de contrat - la violation de la PUV - la nullité du contrat passé avec le tiers : 

Que se passe-t-il si le promettant a conclu le contrat promis au bénéficiaire avec un tiers ?

L’article 1124, alinéa 3 énonce que “le contrat (...) est nul”, si le tiers connaissait l’existence de la promesse unilatérale. Il faut, mais il suffit que le tiers ait connaissance de l’existence de la promesse pour que le contrat encoure la nullité.

Le texte n’exige donc pas de collusion frauduleuse entre le promettant et le tiers. En outre, c’est bel et bien l’« existence » de la promesse unilatérale qui doit être connue, et non l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir comme en matière de pacte.

Le législateur a donc manifestement voulu que l’annulation ne reste pas au rang des hypothèses d’école.

Le contrat conclu entre le promettant et le tiers n’est donc pas seulement inopposable au bénéficiaire ; il est radicalement nul. La formulation de l’article 1124, alinéa 3 du Code civil est peut-être maladroite. Il eut été préférable de dire que le contrat était susceptible d’être annulé.

Après tout, si le bénéficiaire ne demande pas la nullité, parce qu’il préfère se contenter de dommages et intérêts par exemple, rien ne s’opposera à ce que le contrat passé entre le promettant et le tiers s’exécute normalement.

Or, puisque le texte énonce que le contrat « est nul », promettant et tiers exécuteront un « contrat nul », ce qui est absurde.

Quant à la nullité, elle devrait être relative, car elle a pour objet de protéger les intérêts du bénéficiaire.

NB : La PUV portant sur un bien immobilier doit, soit être faite par acte authentique, soit faire l’objet d’un enregistrement dans les 10 jours, à peine de nullité : 1589-2.

NB’ : pour contourner l’inefficacité de la rétractation, ne suffit-il pas au promettant, plutôt que de se rétracter, de vendre immédiatement son bien à un tiers ? Si le bien est vendu avant que l’option ne soit levée, le bénéficiaire ne pourra obtenir la nullité du contrat conclu avec le tiers que s’il arrive à démontrer que ce dernier connaissait l’existence de la promesse...

Les avants contrats - la promesse synallagmatique de vente : 

La promesse synallagmatique de vente fait figure de véritable « serpent de mer ». La nature juridique de cette promesse synallagmatique pose en effet des problèmes qui se matérialisent dans les incertitudes de la jurisprudence de la Cour de cassation. C’est la raison pour laquelle, l’avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux, rédigé par l’Association H. Capitant propose de clarifier sa nature et son régime.

La promesse synallagmatique de vente vaut, en principe, vente (§1). Toutefois, il est possible de reconnaître, par exception, une certaine autonomie à la promesse synallagmatique de vente qui constitue alors un contrat préparatoire distinct de la vente (§2).

Les avants contrats - la promesse synallagmatique de vente - la promesse synallagmatique vaut vente : 

L’article 1589 du Code civil précise que « la promesse de vente vaut vente, lorsqu’il y a consentement réciproque des parties sur la chose et sur le prix ». Même s’il ne le dit pas, cet article vise exclusivement la promesse synallagmatique de vente, à l’exclusion de la promesse unilatérale.

Cet article est une simple application du principe du consensualisme et de l’article 1583 qui précise que les éléments essentiels du contrat sont la chose et le prix. Ainsi, peu importe que les parties ne se soient pas mises d’accord, par exemple, sur les modalités de paiement ou de l’exécution de l’obligation de délivrance.

Par l’accord sur la chose et sur le prix, la vente est formée et la propriété acquise par l’acquéreur dès avant le paiement du prix. En principe, la promesse synallagmatique de vente est donc simplement une vente mal qualifiée.

Ainsi, les « compromis de vente » de la pratique notariale et des agences immobilières sont de véritables ventes, parfaites entre les parties, mais qui ne seront opposables aux tiers qu’une fois publiées au service foncier, ce qui suppose un acte notarié.

Le plus souvent donc, la promesse synallagmatique de vente ou le compromis sont des ventes. Cela ne signifie pas que la vente en question soit systématiquement pure et simple.

Comme vous le savez, le contrat en général, et le contrat de vente en particulier, peut être soumis à des modalités : terme, qui repousse les effets du contrat à plus tard, ou conditions qui, lorsqu’elles sont suspensives, suspendent l’effet du contrat à la survenance d’un évènement incertain.

Autant dire que, le plus souvent, ce que les parties qualifient de promesse synallagmatique de vente ou de compromis est en vérité soit une vente à terme, soit une vente conditionnelle. L’effet de la vente ne se produit pas immédiatement, mais cela n’affecte pas la nature de l’opération en cause.

Par exemple, en matière de vente d’immeubles d’habitation, le contrat de vente est obligatoirement conclu, d’après le Code de la consommation, sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt par l’acheteur.

Les avants contrats - la promesse synallagmatique de vente - Deux questions méritent de retenir l’attention à propos des promesses synallagmatiques de vente qui valent ventes :

– D’abord, les promesses unilatérales d’achat et de vente croisées valent-elles promesse synallagmatique de vente ?

La Cour de cassation considère que les promesses unilatérales d’achat et de vente croisées constituent une promesse synallagmatique de vente, dès lors qu’elles ont le même objet et qu’elles sont stipulées dans les mêmes termes (Com., 22 nov. 2005, Bull. civ. IV, n° 234).

Les promesses unilatérales croisées valent donc vente en vertu de l’article 1589 et aucune des parties ne peut se rétracter.

La Cour de cassation s’en est remis à une logique purement arithmétique : une promesse unilatérale de vente + une promesse unilatérale d’achat = une promesse synallagmatique de vente qui vaut vente aux termes de l’article 1589 du Code civil.

Or, cette logique arithmétique a pu être critiquée au motif que, précisément, au moment où l’opération est conclue, aucune des deux parties ne veut vendre ou acheter. Les promesses croisées ont simplement pour but de fixer les modalités de la vente qui interviendra peut-être si une des parties se décide à vendre ou à acheter, l’autre ne pouvant alors s’y opposer.

En d’autres termes, l’opération de promesses unilatérales croisées se rapprocherait, dans l’esprit des parties, d’une sorte de contrat-cadre par lequel les parties fixeraient à l’avance les règles de leur relation contractuelle future.

Les promesses unilatérales croisées sont ainsi courantes entre actionnaires. Elles permettent de laisser une porte de sortie aux actionnaires si l’entente cordiale qui a permis l’association initiale disparaît ultérieurement. Il n’est alors pas sans intérêt de fixer les conditions de la cession à l’origine, c’est-à-dire à un moment où les relations entre les actionnaires ne sont pas encore conflictuelles...

Par exemple : soit deux actionnaires A et B. A s’engage unilatéralement à vendre ses actions à B, qui s’engage unilatéralement à les acheter. Si A veut partir, il lui suffit de lever l’option de vente que lui a conférée B. Si B veut que A s’en aille, il lui suffit de lever l’option d’achat que A lui a conféré...

Nombre d’auteurs regrettent ainsi l’assimilation des promesses unilatérales croisées à une promesse synallagmatique de vente, les promesses croisées constituant une opération autonome dont l’objet est différent de la promesse synallagmatique de vente.

Les avants contrats - la promesse synallagmatique de vente - Deux questions méritent de retenir l’attention à propos des promesses synallagmatiques de vente qui valent ventes :

– Ensuite, est-il possible de prévoir, dans une promesse synallagmatique de vente, une faculté de substitution au profit de l’acheteur, c’est-à-dire la faculté pour l’acheteur de se substituer une autre personne.

Tout dépend du transfert de propriété :

– Si le transfert de propriété a lieu, comme c’est le cas en principe, lors de l’échange des consentements, c’est impossible. La substitution est alors une revente, qui sera par exemple soumise en matière immobilière à de nouveaux droits de mutation.

– Si le transfert de propriété ne s’est pas produit, soit qu’il soit repoussé à plus tard (terme), ou lié à la survenance d’un évènement incertain (condition), la substitution est possible.

NB : certains juges du fond estimaient que lorsqu’une clause de substitution était présente au profit de l’acheteur dans une promesse synallagmatique de vente l’acheteur ne s’engageait pas vraiment à acheter.

Ils requalifiaient ainsi la promesse synallagmatique en promesse unilatérale. Cette analyse a justement été condamnée par la Cour de cassation qui considère que la clause de substitution n’influe pas sur le caractère unilatéral ou synallagmatique d’une promesse (Civ. 3ème, 28 juin 2006).

L’acheteur qui bénéficie de la clause s’engage bel et bien à acheter. Ainsi, s’il ne trouve pas un autre acheteur, il ne peut échapper à son obligation de payer.

D’ailleurs, le plus souvent, cette clause permet simplement à l’acheteur de se substituer une SCI dont il sera l’associé majoritaire. Il achète donc immédiatement, avant même d’avoir accompli les formalités de constitution de la SCI, afin de ne pas passer à côté de ce qu’il considère être comme une bonne affaire.

NB’ : Comme la promesse synallagmatique de vente vaut vente, c’est le jour de la conclusion de cette promesse qu’il faut prendre pour déterminer la loi applicable à la vente : Civ. 3e, 29 février 2024, 22-24.381.

Les avants contrats - la promesse synallagmatique autonome 

La PSV pourrait trouver une place autonome lorsqu’une condition de validité supplémentaire a été imposée. Il faut cependant distinguer deux hypothèses de « solennisation de la vente ».

Celle dans laquelle les parties ont érigé une forme ou une formalité en condition de validité de la vente (A), et celle dans laquelle c’est le législateur qui a imposé une forme ou une formalité à titre de condition de validité de la vente (B).

Les avants contrats - la promesse synallagmatique autonome - la solennisation de la vente par la volonté des parties : 

Rien n’interdit aux parties d’ajouter une condition de validité au contrat de vente.

Par exemple, les parties pourraient décider que la réitération du consentement à la vente devant notaire n’est pas une condition nécessaire à l’opposabilité du contrat, mais une condition en l’absence de laquelle la vente n’existe pas.

Ainsi, l’accord des parties sur la chose et le prix ne pourrait suffire à former la vente et ce contrat, dans lequel les parties décideraient également de coopérer en vue de la signature devant notaire de la vente, serait une promesse synallagmatique de vente, distincte de la vente elle- même.

La Cour de cassation reconnaît ainsi la faculté aux parties de solenniser la vente d’immeuble.

Encore faut-il que la volonté des parties soit particulièrement claire et qu’il ne fasse pas de doute que la passation de l’acte devant notaire ait été considérée comme une condition de validité de la vente.

Mais que se passe-t-il alors si une des parties refuse finalement de passer devant le notaire ?

Dans des arrêts anciens, la Cour de cassation avait pu annuler la PSV au motif qu’elle était soumise à une condition potestative. Ce n’est plus la tendance principale, la jurisprudence considère généralement que les parties sont tenues d’une obligation de faire : se présenter devant le notaire. Elle se contente alors de sanctionner la méconnaissance de l’obligation de faire par des dommages-intérêts.

Pourquoi ne pas condamner le contractant à l’exécution forcée, ou rendre un jugement valant vente ? Parce qu’alors, il n’y aurait plus aucune différence entre la PSV et la vente, et la PSV n’aurait donc aucune autonomie.

L’article 15 de l’avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux énonce ainsi :

« La promesse synallagmatique de vente vaut vente lorsque les parties sont convenues du bien et du prix. La promesse synallagmatique de vente ne vaut pas vente lorsque les parties, quoique convenues du bien et du prix, subordonnent sa formation à un accord sur un autre élément ou à un accord passé dans une certaine forme.

Le contrat conclu en violation d’une promesse synallagmatique de vente valant vente avec un tiers qui en connaissait l’existence est nul.
L’inexécution d’une promesse synallagmatique de vente ne valant pas vente ne donne lieu qu’à l’octroi de dommages et intérêts ».

Lernen